VORTILLONS

, par Interaction

Question d’un amateur :
Au sujet des générateurs de vortex dont vous parlez dans votre site. Des vidéos sur You Tube montrent des essais effectués sur un FK14 où la vitesse de décrochage passe de 82 km/h à 60 km/h en lisse, soit un Cz max accru de 85% environ. Extrêmement efficace au regard du coût.

Appliqué à des pales d’autogire, l’intérêt est qu’ils permettraient de faire travailler les pales à Cz plus élevé (par augmentation du calage) et réduire les pertes de puissance de profil par abaissement du régime de rotation. Un chiffrage rapide me promet plus de 25% sur la trainée du rotor.
Un seul hic, la trainée de profil des-dits générateurs sur le coté "avançant". D’où ma question : existe-t-il une étude montrant le Cxp associés à ces générateurs sur une aile ?
JC D

Bonjour Monsieur,

Je ne suis pas du tout spécialiste des voilures tournantes. J’ai néanmoins entendu parler des conditions d’auto-rotation et que celle-ci n’était possible que dans une étroite plage d’incidence.
Vouloir faire travailler les pales à des Cz proches de leur Czmax (voire au delà, avec les turbulateurs), c’est à dire à des angles d’incidences proches du décrochage, me semble donc quelque peu curieux. Mais encore une fois, les voilures tournantes me sont assez étrangères.

Quant aux turbulateurs, rentrés dans le cycle des modes après bien d’autres panacées, si beaucoup de personnes montrent et démontrent leur efficacité, je n’ai pas d’éléments bibliographiques faisant référence à des études systématiques chiffrées.

La vidéo du FK-14 semble convaincante, a priori seulement car peu de choses y transparaissent (on ne sait même pas à quelles Czmax les séquences correspondent). Je me souvient du D-112 sur lequel je volais et qui indiquait une Vs0 de 55 km/h (à Md 530 kg et 12,75 m2) et donc un Czmax de 2,85 alors que l’appareil n’avait aucun système hypersustentateur ! Pourtant la vitesse indiquée en croisière était relativement proche de celle du GPS… Ceci pour dire que les Vi commencent à être singulièrement distordues, à la fois par le champ de pression aux grands angles, et les défauts d’alignement du pitot lorsque l’on s’approche du Czmax. Quant aux vitesses GPS, celles-ci sont d’autant moins précises que la vitesse est faible, autrement dit lorsque le rapport distance / temps est petit, en raison de l’imprécision (voulue) de position. Donc méfiance avec les démonstrations... plus ou moins commerciales ! Et méfiance avec les GPS pour les trop faibles vitesses.

En revanche, ce que montre bien la vidéo (grâce aux ombres), ce sont les brins de laine parfaitement collés à l’extrados de l’aile jusqu’au 2/3 de la corde, et nettement décollées (et toujours bien parallèles à l’écoulement) passé la concavité aux environ du 1/4 arrière de corde. Autrement dit, il existe une "couche d’eau morte" parfaitement stable, encore dite "épaisseur de déplacement" (voir première copie d’écran), prête à décoller prématurément à l’approche du décrochage, ce que montre parfaitement la seconde copie d’écran où seule la zone concave est décollée (le Czmax de ce profil, semble donc bien être "écrêté").

Note du claviste : Il se peut aussi que les fils de laine jouent le rôle de déclencheurs de transition laminaire/turbulent, faussant ainsi les résultats observés plus haut. Il faudrait faire des essais avec un moyen moins intrusif (par exemple des badigeons d’huile collorée de pigments, ou encore plus simplement avec deux FK14 identiques en patrouille.

Moralité : voilà donc un profil laminaire (sans doute de la série NLF ?), de faible Czmax lisse (qui demande donc un surcroît de surface alaire qui va traîner), sur lequel on colle des turbulateurs pour augmenter le Czmax (en plus des volets), turbulateurs qui vont d’emblée faire transiter la couche limite et la rendre turbulente, faisant ainsi perdre le principal bénéfice de la laminarité par augmentation de la traînée globale du profil.
Voilà donc une couteuse (parce que les profils laminaires exigent des précisions de fabrication coûteuses) et singulière gymnastique intellectuelle, pour, au final, retrouver des caractéristiques de profil connus depuis plus de 80 ans !

Pour en revenir à votre interrogation initiale, je ne pense pas que des turbulateurs sur vos pales d’autogires soient une solution viable, ne serait-ce que sur le plan mécanique (que se passe-t-il en cas de perte d’un ou de plusieurs turbulateurs sous l’effet d’un impact d’insectes, de gouttes de pluie, de grêlon, en termes de vibrations et de balourds mécanique, voire aérodynamiques) ? Evidemment, je ne saurais vous conseiller que de vous abstenir, en l’absence de l’avis d’un spécialiste reconnu en la matière, d’adopter un profil de pale du type de ceux utilisés par nos spécialistes aérodynamiciens vidéastes sur leurs avions et ULMs.

Bien cordialement,