DE l’ULM À l’ULM, 3 QUESTIONS DE JC
Question 1 : J’ai parcourru l’article "De l’ULM à l’ULM" avec grand interret. Il devient évident que les progrés techniques n’ont pas apportés grand choses aux qualitées de vols de nos ULMs si l’on compare avec les avions allemands de 1924.
Pourtant que se passerrais-il si l’on reconstruirais un de ces appareils de 1924 en apportant les modifications technique d’aujourd’hui ? Ne ferrait on pas une avancé en terme de qualités de vol sur ces machines d’autan ?
Une autre question : quels appareils actuels en Ultra légers ou écolights vous semblent les plus aboutit techniquement et au regard de votre méthode de calcul, les plus "parfait" sur le marché.
Je vous pose la question car je passe a Aéro et voudrais avoir une idée de ce que je devrais visiter pour me faire une idée du type de machines qui apporterrais vraiment une différrence dans le monde UL.
Mais vous pourriez aussi approfondir cette idée de cahier des charges : Une seule configuration de vol, un regime de vol unique. L’avion On-Off ?
Il n’y a en fait que 2 critères de qualité à réussir pour ne pas louper un appareil :
– La qualité massique c’est le rapport Mv (masse à vide) sur Md (Masse au décollage).
– La qualité aérodynamique ou encore "rendement aérodynamique" qui est le rapport de la traînée pure (hors traînée induite) de l’appareil sur la traînée de frottement qu’aurait une plaque plane de même surface mouillée disposée parallèlement à l’écoulement.
En dessous de Mv/Md = 0,5 avec un moteur 4T, on peut considérer que l’appareil est à revoir sur ce plan-là.
Quant à la traînée (aux nombres de Reynolds des ULM et avions légers) une plaque plane placée parallèlement à l’écoulement présente un Cfe (Coefficient de frottement) de 0,003 (ou encore de 3 ‰). On estime qu’au-delà de 4,5 ‰ (soit 50 % de traînée supplémentaire), il y a un problème.
Reste à faire un diagnostique pour savoir où se situe ce problème (trainée de culot, interaction aile-fuselage, traînée de refroidissement, etc...), et intervenir pour le corriger.
Les machines allemandes des années 20 avaient en général de bonnes qualités massiques. Les matériaux modernes n’y changeraient donc pas grand-choses (ou de façon marginale) sauf sur les temps de fabrications... Malheureusement, si l’on regarde ce que l’on a fait avec ces matériaux modernes, c’est plutôt pire que ce qui existait avant. Et la question des qualités de vol, souvent avancée, n’est pas un argument parce qu’elles sont indépendantes du matériau.
Il y aurait en revanche beaucoup à gagner sur l’aérodynamique qui étaient (en général, mais il y a eu des exceptions proches des limites possibles) très moyennes. Mais si l’on regarde ce que l’on arrive à faire comme catastrophe aérodynamique avec les composites censés autoriser toutes les formes imaginables, on en reste coi ! La mode est aux fuselages pincés, alors que l’on sait depuis Eiffel (1903) quelle forme donner aux corps pour qu’ils offrent le moins de résistance possible à l’air...
Maintenant, puisque vous parlez de "qualité de vol" ( c’est-à-dire de pilotabilité et de stabilités), il faut savoir que c’est un domaine différent, indépendant de celui de la qualité aérodynamique, et qu’il est régit par des lois, parfaitement connues. En général les appareils actuels ont plutôt des qualités de vol acceptables, car cela est immédiatement détectable par les pilotes et que si l’on veut vendre, on fait les modifications pour améliorer tel ou tel comportement, alors que pour la qualité aérodynamique, on constate après coup que les perfos ne sont pas à la hauteur des espérances et, comme "on ne voit rien", on en reste là, ou on met un moteur plus puissant (cf. le succès du Rotax 912 S de même masse que le 912, mais 25 % plus puissant...)
Question 2 : quels appareils actuels en Ultra légers ou écolights vous semble les plus aboutis techniquement et au regard de votre méthode de calcul, les plus "parfaits" sur le marché.
Le plus parfait aérodynamiquement était le Heinkel He 119 V4 de 1937 (2350 cv !) qui obtenait un Cfe de 3,2 ‰ (0,0032), sans profil laminaire soit dit en passant !
Actuellement il semblerait qu’il soit rejoint par le racer "Nemesis". Il y a également le White-Lightning (4 places composite américain 210 CV 440 km/h) qui est à 3,25 ‰.
Pour le reste, Le Lancair et toutes ses copies plus ou moins conformes, y compris ULM, naviguent à plus 5,5 ‰ soit 80 % de traînée de plus que ce qu’il est possible d’obtenir !
Le MCR pour sa part tourne autour de 5 ‰ ... En revanche le MCR est celui qui a le mieux réussi son devis masse, ce qui fait qu’il représente actuellement l’ULM le mieux abouti... Mais pour un coût d’avion certifié ! On est loin de l’esprit ULM.
Un autre aspect sur lequel se pencher c’est celui de la tenue structurelle. C’est bien beau que de gratter à droite et à gauche sur la structure pour grappiller des grammes, et dégager suffisamment de masse à emporter pour ne pas voler constamment en infraction pour cause de surcharge. Mais si cela doit se faire au détriment de la tenue structurelle, cela n’a pas vraiment de sens. Pour ne citer que la "fascination" de Dallach, combien y a-t-il déjà eu de ruptures en vol sous rafale un peu forte, parce que l’appareil, pour être performant est motorisé par un 912 S, qu’il a un allongement important, et qu’il doit malgré tout tenir une masse à vide excessivement faible alors que par ailleurs ont été fait des choix d’équipement superfétatoires, mais néanmoins très pesant tels que train rentrant, hélice à pas variable ?
3eme question Pourriez vous aussi approfondir cette idée de cahier des charges : Une seule configuration de vol, un regime de vol unique. L’avion On-Off ?
La réponse :
Là, on n’est plus dans l’aéronautique... L’aéronautique est un domaine dangereux par nature, parce que tout se termine toujours au sol. Il y a donc une exigence vitale de rigueur, de tous les instants et de tous les domaines, y compris du pilotage. Si l’avion On-Off peut représenter un idéal marketing, il va à l’encontre de l’esprit de rigueur absolue. Et ce n’est pas une attitude dogmatique que je défends là. Si l’esprit ULM se distingue de l’esprit "aéronautique" en ce sens que l’on avait plutôt affaire à une population de "consommateurs" par opposition à une population "d’utilisateurs", il semblerait que petit à petit les choses évoluent vers une plus grande responsabilité. Le concept "On-Off", c’est le concept de l’engin automobile avec lequel on s’arrête en bord de route en cas de dysfonctionnement.
Cela dit, c’est aux utilisateurs qu’il appartient de définir un CdC (Cahiers des Charges), pas au concepteur. Nous pouvons aider un (ou des) utilisateur(s) pour définir un CdC et il n’y a là aucun problème pour nous, mais nous ne pouvons pas nous substituer à eux. Ce qu’il faut encore savoir, c’est qu’il est possible de remplir un CdC donné par une multitude d’appareils tous différents les uns des autres, mais il n’y en aura qu’un seul qui le remplira avec un coût énergétique minimal.
Ceci a pour conséquence qu’un avion n’est réellement adapté qu’à un seul et unique profil de mission. En d’autres termes, l’appareil polyvalent prétendument économique en raison de sa polyvalence, n’est qu’un leurre. Tout avion polyvalent est nécessairement plus coûteux qu’un avion spécifiquement adapté à une mission donnée (CdC).
Bien entendu, il s’agit là d’une position de principe. La réalité est plus nuancée, et l’on peut tenter de trouver les moyens-termes qui permettent d’élargir une "plage" d’optimalité moyennant une dégradation acceptée de 1, 2 ou 3 % sur un certain nombre de paramètres. C’est du reste, dans cet esprit que nous travaillons.
En espérant avoir répondu à vos interrogations